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Réconciliatio
n

La tombée de la nuit sauva la vie de Madox, car Alejandre dut cesser sa macabre tournée. Le sire de Canac n’hésitait pas à tuer d’un coup d’épée en plein cœur quiconque lui semblait trop mal en point pour reprendre la route dans les deux jours, mais il dut s’arrêter avec le coucher du soleil, c’est-à-dire à moins de vingt mètres de Madox. Frayard et Mayence poussèrent un soupir de soulagement. Ils avaient déplacé le Déüs loin du site de la bataille justement dans l’espoir de gagner du temps. L’aîné avait recensé les blessures et soigné les plus graves, mais ce n’était pas les plaies externes qui l’inquiétaient vraiment. Ayant été écrasé par le vers de sable, Madox pouvait présenter des lésions internes qui risquaient de causer sa perte. Trop mal en point, le jeune homme ne parvenait pas à utiliser sa propre magie pour se guérir. Ses pouvoirs avaient été sollicités à outrance après sa bavure sur la Montagne aux Sacrifices et les réserves d’énergie du Déüs étaient insuffisantes.

— Il nous faudrait Zevin, conclut Mayence.

— Celui vers qui Alix voulait que tu le conduises après notre rencontre dans le désert de Jalbert ?

— Oui. C’est un guérisseur exceptionnel. Mais il ne peut se déplacer que vers les endroits qu’il a déjà visités, et je doute que ce désert perdu en soit un.

— Madox pourrait-il le faire venir jusqu’ici ?

— S’il était en forme, oui. Mais sûrement pas dans son état actuel.

— Et Alix ?

— Il n’a pas ce don, Frayard. Très rares sont les êtres capables d’en attirer d’autres à eux magiquement. À ma connaissance, il n’y a que les Déüs, quelques sorcières parce qu’elles sont d’anciennes Filles de Lu… Mais la voilà peut-être la solution ! s’exclama Mayence. Naïla ! Alix doit savoir où la trouver et…

Sans plus attendre, le mancius tenta d’entrer en communication avec Alix.

 

* *

*

 

Alix et Naïla avaient donné une sépulture décente à l’huldre, puis avaient repris le chemin du Sanctuaire des Filles de Lune, habités par des sentiments mitigés. Les Chinorks les avaient laissés seuls, regagnant leur village près du sommet. Il ne restait que quelques centaines de mètres à franchir pour atteindre la grotte et les amants avançaient en silence, préoccupés. Le message de Mayence fit donc sursauter Alix, qui entretenait peu de contacts avec quiconque depuis les événements ayant conduit au retour de Naïla du monde de Brume. La vie l’avait depuis happé dans un tourbillon et il s’en tenait aux priorités, remettant à plus tard tout le reste, dont la nécessité de prendre des nouvelles de ses plus proches collaborateurs.

— Madox est en danger et nous sommes incapables de faire venir Zevin. Il nous faut quelqu’un pouvant se déplacer jusqu’à nous, puis guider magiquement ton ami guérisseur. Si tu sais où est Naïla, tu crois qu’elle pourrait nous aider ?

— Que se passe-t-il ? s’informa l’Élue, qui avait perçu le mouvement de surprise de son Cyldias.

Alix lui fit signe d’attendre et elle comprit qu’il communiquait par télépathie. En voyant les rides se creuser entre ses sourcils, elle commença à s’inquiéter, se mordillant nerveusement l’intérieur de la joue. Depuis sa vision du sacrifice, elle appréhendait l’annonce d’une mauvaise nouvelle.

Quand Mayence eut terminé son récit condensé de la situation, la décision d’Alix était prise. Naïla continuerait seule sa route. Il demanderait à Yodlas et aux Chinorks d’assurer une surveillance accrue. Il fallait absolument que la jeune femme obtienne la liste des Filles de Lune déjà venues, consulte l’oracle et, surtout, convainque Alana de lui simplifier la vie. Comme il pouvait difficilement l’aider dans l’une de ces tâches, il serait plus utile auprès de Madox. Il reviendrait dès que le Déüs serait tiré d’affaire. Le plus délicat était de mentir pour ne pas inquiéter la Fille de Lune quant au sort de son frère. Elle serait bien capable de tout laisser en plan pour tenter de le sauver. Et mettre Naïla en présence d’Alejandre n’amènerait que des ennuis. Comme s’ils en avaient besoin !

— Tu vas me dire ce qui se passe à la fin ! s’impatienta Naïla.

— Calme-toi. C’est Mayence, le mancius dont je t’ai déjà parlé.

Naïla fronça les sourcils à son tour avant de hocher la tête.

— Il a des ennuis dans les Terres Intérieures. Il est blessé, incapable de conduire Zevin à lui pour que celui-ci le soigne et il est trop faible pour revenir. Je vais me rendre là-bas, guider Zevin jusqu’à nous puis revenir rapidement parce que je m’ennuierai affreusement de toi, gouailla-t-il, sourire en coin.

Naïla pinça les lèvres, mais le badinage d’Alix dut être convaincant puisqu’elle s’abstint de poser davantage de questions. Le Cyldias appela ensuite Yodlas et lui confia sa compagne. Puis, après une dernière recommandation de prudence destinée à sa Fille de Lune, Alix disparut.

Il se matérialisa au pied de la montagne, où il communiqua avec Zevin, qui se réjouit d’avoir enfin de ses nouvelles. Le guérisseur lui expliqua où il se trouvait et Alix s’y déplaça. Zevin continuait de perfectionner son art dans les nombreux villages côtiers, tout en recueillant un maximum d’informations sur tous les événements le moindrement insolites. Il attendait ainsi d’utile façon le moment où ses dons seraient sollicités pour une possible guerre. À son ami, Alix révéla la vérité, simple et crue. Zevin s’empressa de donner son accord pour le suivre, remettant à plus tard le récit de ce qui s’était passé depuis leur dernière rencontre et la description de ce pouvoir de déplacer les gens nouvellement acquis.

Le Cyldias se matérialisa dans le désert, à quelque deux cents mètres des campements d’Alejandre. Il repéra tout de suite l’aura de Madox, malgré sa faiblesse. Sans attendre, il guida Zevin à lui, et ensemble, ils se mirent en marche.

Au fur et à mesure qu’ils avançaient, les gémissements de douleur des nombreux blessés devenaient de plus en plus audibles. La puanteur des champs de bataille – odeur douce-amère du sang mêlée aux miasmes des cadavres en putréfaction – prenait à la gorge, omniprésente et pénétrante.

— C’est un véritable carnage, remarqua Zevin.

— On dirait bien que mon frère a rencontré plus fort que lui, une fois de plus.

Prudemment ils s’approchèrent de l’endroit où se trouvait Madox. Mayence et Frayard se reposaient tout en veillant sur le blessé, légèrement à l’écart des autres campeurs. Peu de feux de camp étaient visibles. Le désert étant avare de combustibles, il fallait s’habituer aux nuits froides et se contenter de sa couverture pour se tenir chaud. Les mutants avaient généreusement cédé la leur au Déüs qui frissonnait dans un sommeil agité.

— Comment va-t-il ? s’enquit Alix après les salutations d’usage.

— Mal, répondit Frayard. Et comme Alejandre a menacé de tuer tous ceux qui ne pourraient pas reprendre la route d’ici après-demain, j’ai peur pour lui. Il est impensable qu’il soit capable de se remettre dans un délai aussi court. D’où le besoin des dons de Zevin, dont m’a parlé Mayence.

Pendant qu’Alix et les deux mancius échangeaient sur le déroulement des récents événements, Zevin se pencha sur le frère de Naïla. Il n’eut besoin que de quelques minutes pour évaluer l’étendue des dégâts. Il fouilla ensuite dans sa besace à la recherche de sachets contenant de savants mélanges de son cru. Magiquement, il fit chauffer l’eau qu’il avait versée dans une tasse qu’il trimballait partout. Il fit infuser les herbes et attendit que le bouillon tiédisse avant de le faire boire à Madox, qui daigna ouvrir les yeux en grommelant contre la fraîcheur ambiante. Alix eut envie de lui dire, pour détendre l’atmosphère, qu’il n’avait que ce qu’il méritait, lui qui avait refusé de l’écouter quand il l’avait magiquement conduit à Naïla contre son gré. Mais il se retint. Il ignorait comment le jeune homme allait prendre son intrusion dans sa vie même si c’était avant tout pour le sauver. Zevin, de son côté, travaillait dans la quasi-noirceur, n’ayant pour tout éclairage qu’une lune discrète. Il chuchota quelques mots à l’oreille du Déüs avant de porter une nouvelle fois la tasse à ses lèvres. Le blessé but finalement d’une traite la décoction au goût fadasse, entraînant une quinte de toux qui ne semblait pas vouloir finir.

Rapidement, Alix aida le guérisseur à redresser son ami puis à l’asseoir. L’exercice eut pour effet de susciter la curiosité de Madox quant à la présence de Zevin, puis d’Alix, à qui il n’avait pas parlé depuis qu’il l’avait prévenu de la transformation de son stupide frère.

— Qu’est-ce que vous faites ici tous les deux ? grommela le Déüs d’une voix trop basse.

Prudent, le Cyldias laissa le guérisseur répondre.

— Tes amis s’inquiétaient alors nous sommes venus constater les dégâts, répondit Zevin, pince-sans-rire. Tu ne vas quand même pas nous reprocher de prendre soin de toi !

Madox eut un semblant de sourire avant de demander :

— Depuis quand êtes-vous capables de vous déplacer vers des endroits que vous n’avez jamais visités avant ? Est-ce que Naïla est là ?

« Déduction logique, pensa Alix. Il ne devrait y avoir que sa sœur pour réussir un tel exploit. »

Il décida de se jeter à l’eau… à demi.

— Elle est au Sanctuaire des Filles de Lune pour compléter la passation des pouvoirs ; elle est la nouvelle Grande Gardienne et succède ainsi à Maxandre. Elle va plus que bien et ne se gêne pas pour me remettre à ma place, ce qui, j’imagine, te remontera le moral.

Les deux hommes se jaugèrent du regard un instant. Pas besoin de l’astre lunaire, ni d’un quelconque éclairage, pour juger du sérieux de la situation ; la tension était palpable entre les deux hommes. Madox serra les dents, avant de décréter :

— Si ma sœur est la nouvelle Grande Gardienne et qu’elle juge néanmoins qu’il vaut la peine de continuer à te fréquenter, ne serait-ce que pour te remettre à ta place, alors je m’incline.

Il reprit péniblement son souffle avant d’ajouter :

— Mais ne venez pas me voir pour vous plaindre l’un de l’autre parce que je jure que je vous tords le cou…

La grimace de douleur qui ponctua sa phrase, et qui se voulait une ébauche de sourire, soulagea le cœur et les épaules d’Alix d’un grand poids. Il se tourna vers Zevin, qui avait profité de l’échange pour refaire une auscultation magique du blessé.

— Ton verdict ?

— Il a de nombreuses contusions internes. Il a besoin de quelques jours de repos et d’une aura guérisseuse de son cru.

— Mais il ne pourra pas prendre de repos ! Alejandre a décrété l’arrêt de mort de tous les blessés incapables de…, commença Frayard, inquiet.

— Une cellule temporelle réglera très bien le problème, le coupa Alix. Il doit simplement reprendre assez de forces pour en créer une.

— C’était la mission de la potion que je viens de lui faire ingérer. D’ici une heure ou deux, il sera en mesure de prendre sa guérison en main et sera sur pied au lever du jour.

— Je vais l’accompagner en cellule temporelle. Comme je peux y faire apparaître tout ce que je veux, il sera plus facile d’y rester le temps qu’il faudra. De plus, ça nous permettra de mettre un point final à cette stupide dispute en clarifiant la situation.

— Depuis quand peux-tu trafiquer ainsi les cellules temporelles ? s’étonna Zevin.

— Je ne les trafique pas, je les utilise à leur pleine capacité, rectifia Alix, sourire en coin. C’est différent !

Profitant de la pause obligatoire qu’exigeait le début du rétablissement de Madox avant de pouvoir transiter en cellule temporelle, Alix se lança dans le récit de ses derniers mois en compagnie de Naïla. Les multiples questions de Zevin après son exposé firent prendre conscience à Alix que sa magie ne souffrait plus d’une absence prolongée aux côtés de Naïla. Les deux hommes en vinrent à la conclusion que la combinaison des deux statuts – celui de Grande Gardienne et celui de Sage d’Exception – avait libéré le Cyldias de cette contrainte.

Madox et Alix disparurent ensuite pour reparaître frais et dispos dans les secondes suivantes. Alix avait pris soin de parfaire plusieurs sortilèges récemment appris pour éviter que son séjour dans l’espace-temps ne nuise à Delphie. En quatre jours volés au temps, les deux compagnons avaient retrouvé leur complicité d’autrefois, ce qui représentait une grande victoire pour la Terre des Anciens.

À l’aube, le guérisseur et le Cyldias avaient regagné leur occupation de la veille, et Madox et ses acolytes partaient à la recherche des blessés pour qui il restait un espoir de vivre, prenant soin de ne jamais trouver dans les environs du triste sire. Ils en profitèrent pour faire un décompte sommaire des morts, autant du côté des mancius que des humains. Le constat final : quelque cent cinquante soldats en moins, dont une quarantaine de mutants. Triste pour les mancius. Quant aux autres, ils n’avaient qu’à rester chez eux, pensa Madox, sans pitié aucune.

 

* *

*

 

Panser magiquement ses plaies ne permit pas à Mélijna d’apaiser sa colère. Au contraire, celle-ci avait décuplé, atteignant d’alarmantes proportions, comme chaque fois qu’il était question des Filles de Lune de la lignée maudite. Comment expliquer qu’elle ne puisse pas, comme pour Naïla depuis son dernier retour de Brume, repérer l’Insoumise Lunaire ? Se pouvait-il qu’elle ne soit plus en mesure de détecter la présence de ces précieuses femmes ? Comment savoir sans l’arrivée d’une nouvelle Fille de Lune ? Ces questions n’étaient pas les seules qui envahissaient l’esprit de la sorcière. Il y avait également le problème de ne pas pouvoir se rendre dans la cité de Ramchad ni en périphérie comme elle le souhaitait. Comment pourrait-elle étudier les lieux si on l’empêchait d’y accéder ?

D’une main rageuse, elle se servit une grande rasade de la potion qui la maintenait toujours en vie, fulminant de ne pas avoir pu mettre la main sur Maëlle quand il était temps. Elle était contrainte d’attendre que cette Fille de Lune refasse surface, tout en craignant de ne pas en avoir conscience le moment venu.

Alors que la sorcière tournait en rond dans son antre, incapable de se concentrer sur un seul problème à la fois, la scène à laquelle elle avait assisté plus tôt dans la journée revint la harceler. Dans la cour, Nogan avait crié une série d’invectives aux Exéäs, les enjoignant de nettoyer les dégâts qu’ils venaient de faire. Nullement incommodés par l’impatience de plus en plus fréquente de leur tuteur envers le nombre incalculable de leurs bêtises, les jumeaux lui avaient répondu par un long babillage. Au moment où Nogan s’était avancé pour infliger une punition, l’un des gardes du château avait franchi le pont levis et pénétré dans la cour. La suite avait paru irréelle à Mélijna. Menise s’était retournée, les yeux plissés et le visage crispé. D’un simple geste du pouce, elle avait désarçonné le cavalier, qui s’était brisé la nuque en tombant. Un bref sourire de satisfaction s’était affiché sur les traits de la gamine. Si bref que la sorcière avait cru l’avoir rêvé. Puis cela avait été la crise de larmes quand Nogan avait posé une main sur l’épaule de Menise. L’enfant avait repris ses esprits et compris, dans la mesure de ses capacités, ce qui venait de se passer. Mélijna avait grincé des dents, avant de faire disparaître le cadavre. Face à ce deuxième incident, elle s’était demandé si, contrairement à sa propre expérience, l’entité qui habitait l’enfant n’était pas un sympathisant à la cause de Darius. Ce serait bien le comble !

Mélijna secoua la tête, revenant au présent. La potion d’obéissance avait eu un effet limité sur le comportement des enfants, qui avaient rapidement recommencé à n’en faire qu’à leur tête. Elle avait eu beau chercher, elle n’avait pas trouvé de meilleure méthode pour les contraindre, au grand désespoir de Nogan. Elle avait pourtant fouillé dans de vieux grimoires depuis longtemps défraîchis, de même que dans de plus récents. Sans succès.

Malheureusement, le fait de feuilleter tous ces bouquins lui rappelait continuellement la perte du grimoire des Filles de Lune. Elle ne pouvait repérer ce précieux manuscrit d’aucune façon et donc, elle ignorait toujours les raisons de l’ascension de son exécrable sœur au rang de spectre. Sa sœur… Penser à cette chipie l’agaçait toujours autant. Elle avait l’impression qu’un autre souvenir planait dans sa mémoire en même temps que celui de Séléna, un souvenir aussi important que les déboires que Mélijna avait vécus par la faute de sa famille.

La sorcière s’assit dans son fauteuil et ferma les yeux. Si elle voulait progresser, il lui fallait étudier les choses une à une, de façon distincte. Elle laissa donc les récriminations qu’elle entretenait au sujet de Séléna refaire surface et se succéder à vitesse variable, selon leur incidence sur sa vie. Étonnamment, ce qu’elle s’attendait à voir comme un interminable défilé passa en un éclair pour la conduire, beaucoup plus tard, à une époque où sa sœur n’était plus de ce monde depuis bien longtemps déjà, à l’époque où Mélijna avait fait la connaissance d’un curieux jeune homme, un individu qu’elle avait revu récemment. Dans l’esprit de Sacha.

La sorcière bondit sur ses pieds. Ce n’était pas possible ! Roderick avait croisé son chemin près de deux cents ans plus tôt, avant de mourir sous ses yeux. Elle se souvenait parfaitement des dernières minutes du mécréant et ne voyait pas comment il avait pu en réchapper ! À moins que, comme le rouquin qu’elle avait pu observer aux côtés de Séléna, ce soit un descendant ressemblant à son aïeul. Cela pouvait expliquer que Menise soit habitée par une personnalité différente de la sienne puisque Roderick était un mage doué. Il devait donc nécessairement avoir des ancêtres qui l’étaient tout autant et des descendants également. La sorcière soupira. Elle n’était guère plus avancée. À moins que ses traqueurs ne parviennent à retrouver le curieux jeune homme.

 

* *

*

 

Kaïn avait regagné la cité de Ramchad pour préparer l’arrivée de son armée. Pourtant, une fois sur place, il ne savait trop que faire. Il ne voyait pas comment il pourrait rendre la ville habitable en si peu de temps. Obnubilé par l’imminence de la guerre et l’urgence de ce transfert, il n’avait pas songé à cet aspect. Il se dirigea vers la bibliothèque où il percevait l’aura d’Andréa. Peut-être qu’à deux, il serait plus aisé de déterminer les priorités. Et, il devait se l’avouer, la seule présence de l’Insoumise apaisait ses pires craintes.

Le Sage se glissa à l’intérieur de l’immense édifice en plissant les yeux. Le soleil de fin d’après-midi pénétrait abondamment par certaines ouvertures. Les peaux obstruant les fenêtres s’étaient abîmées au fil du temps, laissant entrer non seulement la lumière, mais aussi une importante quantité de sable charrié par les grands vents qui soufflaient dans le désert. Il repéra Andréa et s’empressa de la rejoindre, le sourire aux lèvres. L’Insoumise leva des yeux exaspérés de son bouquin ; elle affichait une mine sombre.

— Que se passe-t-il ? s’enquit Kaïn, qui s’attendait à un accueil plus chaleureux.

Elle lui raconta son altercation avec Mélijna et l’intervention des sylphes.

— Tu auras certainement l’occasion de te reprendre, tenta Kaïn pour adoucir l’humeur de la Fille de Lune, qui s’était emportée avant la fin de son récit. Ce n’était sûrement pas ta dernière rencontre avec cette harpie.

— Je sais, mais j’aurais aimé qu’elle souffre davantage. Elle a fait de mes premières années sur la Terre des Anciens un enfer. Jamais je ne lui pardonnerai ce calvaire bien gravé dans ma mémoire, pas plus que ce qu’elle a fait subir à ma fille sans que je puisse l’en empêcher…

Andréa chassa ses réminiscences d’un geste de la main avant de s’enquérir du voyage de Kaïn.

— Comme nous ignorons où et quand Saül frappera, les orphelins auront le temps de se faire eux-mêmes une place confortable dans la cité tout en assurant leur subsistance. Cet usage particulier de la magie leur permettra de développer une autre facette de leurs talents multiples, ce qui leur servira plus tard en cas de famine ou d’un quelconque problème se rapportant à la survie pure et simple.

— Je savais que tu trouverais des qualités insoupçonnées à cette arrivée précipitée !

— Comment comptes-tu les faire se déplacer jusqu’ici sans attirer l’attention ? s’enquit Andréa avec à-propos. Je doute que ces jeunots soient capables de se déplacer vers un endroit où ils ne sont jamais allés, à moins que les méthodes d’enseignement des Sages d’autrefois soient immensément plus perfectionnées que le peu dont j’ai eu la chance de profiter de la part de Morgana.

— De fait, c’est un des aspects de cette affaire qui m’inquiète le plus. Il faudrait que nous les dirigions un à un puisque nous sommes tous deux capables de les guider jusqu’ici magiquement. Le problème, c’est que ça risque de prendre plusieurs jours avant que nous terminions. Je ne voudrais surtout pas que, par un incroyable manque de chance, quelqu’un passe dans le coin de l’Orphelinat alors que nous sommes en plein transfert. La Quintius s’est tenue beaucoup trop sage depuis quelques mois pour que nous n’ayons pas bientôt une désagréable surprise. Mieux vaut donc faire preuve de la plus grande prudence.

— Les élémentaux de l’air ne peuvent pas nous être utiles ? Ça rachèterait peut-être leur bourde concernant Mélijna.

Kaïn soupira.

— Je ne vois pas comment, mais ça ne coûte rien de demander.

— Si nous pouvions avoir le soutien de Naïla et d’Alix, ça nous permettrait au moins de déplacer quatre personnes à la fois au lieu de deux.

— À condition qu’ils puissent venir. Je doute qu’ils en aient terminé avec la potion de Vidas.

— Il n’y a rien dans cette bibliothèque qui pourrait nous donner un coup de main ? Il devait bien y avoir autrefois une façon de déplacer les armées par magie rapidement. Je ne peux pas croire que personne n’en a eu besoin avant nous, grommela Andréa.

— Je ne me souviens pas d’avoir jamais rencontré quoi que ce soit de ce genre, mais ça vaudrait la peine de jeter un œil au cas où. Sinon, il faudra utiliser la bonne vieille méthode…

 

Quête d'éternité
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